vendredi 26 octobre 2018

Les ibis chauves de la réserve de Birecik

Le patrimoine archéologique de la Turquie n’est pas le seul à être exceptionnel. Son patrimoine naturel est doté d’une biodiversité remarquable. Faune et flore y sont abondamment représentées sur un territoire aux reliefs et climats contrastés d’une région à l’autre.
Les oiseaux y trouvent des conditions favorables du fait de l'existence d'immenses surfaces irriguées, fleuves et lacs. Plusieurs couloirs de migration traversent le pays.
J’ai eu l’occasion de vous parler des cigognes que l’on peut voir en Thrace, dans le ciel d’Istanbul ou des côtes égéennes et dont les colonies se portent plutôt bien pour le moment.
L’ibis chauve, lui, fait partie des oiseaux menacés d’extinction.


En 1930, 3000 ibis nichaient sur des parois rocheuses à proximité de Nizip, (à une dizaine de km de Zeugma) dans le sud-est anatolien. Les villageois fêtaient leur retour spectaculaire au printemps.
Dans les années 50 ans l’utilisation intensive de pesticides (DDT) pour protéger les cultures des invasions de sauterelles, avait décimé gravement la population.
Ce centre de protection des ibis a été fondé en 1977.
Je l’avais vu en mai 2002 et les oiseaux nichaient en liberté. On en apercevait quelques uns et la balade le long de la falaise était agréable. Je ne me souviens pas d’avoir vu de cages, mais il en existait déjà, peut être plus discrètes.

Devant le spectacle, affligeant au premier coup d’œil, de cette énorme volière retenant captifs les ibis, la consternation se peint sur nos visages.



Mais près de la barrière qui interdit toute velléité de promenade aux alentours, le spécialiste (Kelaynaci Mustafa) a déjà commencé son exposé.
Et l’on apprend que les oiseaux vivent en pleine nature et en liberté dès mi-février et ne sont soumis au confinement qu’à partir de fin août.  
La migration est devenue pour eux trop hasardeuse. Jusqu’en 1990 on les laissait librement migrer et la plupart s’envolait vers l’Afrique (Érythrée, Éthiopie, Yémen) et vers l’Arabie saoudite mais beaucoup mouraient en route, en traversant la Syrie et la Jordanie (chasse, empoisonnement ou manque de nourriture).
Cette année la, un seul est revenu au début du printemps et depuis, leur migration est contrôlée. Des tentatives sont faites ponctuellement avec un nombre limité d’individus portant des balises. Mais beaucoup n’arrivent jamais à destination et le retour des rescapés n’est pas moins périlleux. En 2010 deux sur cinq sont revenus. Les autres sont morts empoisonnés.
Leur durée de vie est de 25 ans environ et ils ont pour caractéristique d’être monogames et fidèles. Supportant très mal le veuvage, certains se laissent mourir ! Ils couvent 1 à 3 œufs par an.

Actuellement, la colonie compte environ 280 oiseaux dont une quarantaine de jeunes de la dernière couvée. En captivité, ils reçoivent des soins et une nourriture spécifique matin et soir composée d’un mélange de viande rouge, de fromage non salé, de carottes, de graines et d’œufs dur.
En liberté ils s’envolent en groupe sur une dizaine de kilomètres pour piquer de leur long bec recourbé insectes, lézards, sauterelles, fourmis et même serpents et scorpions et glaner quelques céréales au passage.


Le discours de Mustafa est convaincant et l’on espère avec lui qu’un jour pas trop lointain, ces oiseaux et leurs descendants n’auront plus besoin d’être protégés et que cette cage n’aura plus de raison d’être…

D'autres oiseaux peuplent en liberté cette région arrosée par l'Euphrate. 


Et quelques autres spécimens d'une riche faune



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