vendredi 10 décembre 2021

Le Petit Palais réenchanté par J-M Othoniel

Le Petit Palais, Musée des Beaux-arts de la ville de Paris, est depuis longtemps l’une de mes destinations favorites tout autant pour son architecture éclectique, ses collections permanentes, ses expositions temporaires, que pour son jardin intérieur évoquant les patios confidentiels méditerranéens ou orientaux.



Les marches de l’entrée monumentale avec sa grille en fer forgé rutilante sont parées d’un tapis surprenant. Une rivière de briques de verre bleu nous conduit irrépressiblement loin des contingences et de la frénésie du quotidien. Ne reste plus qu’à prononcer la formule magique « Sésame ouvre-toi ». Si ça ne fonctionne pas on peut utiliser la nouvelle version, le QR code du pass sanitaire affiché sur l’écran d’un téléphone portable, plus efficace actuellement pour accéder à l’exposition de Jean-Michel Othoniel « Le Théorème de Narcisse ».

 
Derrière les vitres du grand vestibule, une sculpture de lotus hypnotise déjà le regard.  C’est dans le jardin  il se dresse en majesté accompagné d'autres lotus d’or flottant sur les eaux des bassins ourlés de mosaïques, que le voyage aux pays des Mille et Une Nuits, commence. La caverne d’Ali Baba et ses trésors chatoyants est toute proche, comme semblent l’annoncer les colliers suspendus aux branches.







Les perles démesurées des nœuds miroirs, en enfilade sous le péristyle, reflètent à l’infini les fresques des voûtes, les colonnes élancées, les pavements de mosaïques au sol, et les reflets de notre image. 



L’invitation à regarder plus attentivement notre environnement se matérialise par une sensibilité retrouvée et l’on aperçoit soudain une étrange fleur de bananier en bouton, suspendue comme à un ressort pliant sous le poids.

 
A l’intérieur, la transfiguration des espaces continue avec la délicate Couronne de la Nuit qui surplombe l’un des deux majestueux escaliers, Art Nouveau. Ce lustre en perles de verre soufflé de Murano restera en place après la fin de l’exposition. Il a été offert au musée par l’artiste.



 
En contrebas, une grotte de briques de métal offre un refuge pour libérer la parole selon l’intention de l’artiste. On peut s’y asseoir un instant seul ou à plusieurs pour se soustraire aux regards, avant que l’attention ne soit happée par les couleurs vibrantes des nœuds de perles se contorsionnant dans l’espace au-dessus d’un tapis de briques de verre aux tonalités aquatiques.




 
Dans la salle suivante d'autres nœuds, installations précieuses sur leurs socles miroirs, reflètent mille nuances à l’ infini.
Selon les textes jalonnant l’exposition :
« Ces nœuds sauvages sont inspirés des théories du scientifique mexicain Aubin Arroyo, sur les reflets infinis obtenus à partir de modèles mathématiques complexes. Renouant les liens anciens qui unissent astronomie, art et mathématiques, Othoniel invente ainsi de nouveaux théorèmes. »



 
« Peints à l’encre de Chine sur fond d’or blanc, des nœuds inspirés de la forme des pivoines répondent aux sculptures sur socle, Nœuds du réel ou Nœuds de l’imaginaire ; la Grotte de Narcisse ouvrant ainsi sur l’infinie complexité humaine. »
 
On termine ce parcours enchanteur sur une œuvre plus intimiste :
« Une superbe vitrine du XIXe siècle abrite une petite sculpture en perles de verre violettes inspirée du chrysanthème japonais. Ce Kiku (2021), tel un bijou, adresse un ultime clin d’œil à Narcisse et à ses reflets. »

 
Au final, le trésor que l’on trouve ici c’est une parenthèse de rêve et de poésie, c’est la possibilité de porter un regard émerveillé d’enfant sur ce qui brille, ce qui scintille, ce qui s’apparente à de la magie. 
Ce théorème imaginaire est une bien agréable proposition pour s’immerger dans la réflexion : réverbération, diffusion, rayonnement, miroir… mais aussi la réflexion : pensée, discernement, perception, introspection…
 
Le Théorème de Narcisse de Jean-Michel Othoniel au Petit Palais
Depuis le 28 septembre 2021 jusqu'au 2 janvier 2022. Entrée gratuite



 

dimanche 28 novembre 2021

Le Paris coloré de Dufy

Pour conjurer les effets ravageurs de la menace renouvelée d’une situation sanitaire qui s’enlise dans l’incertitude et l’inquiétude, il faut aller voir l’exposition consacrée à Raoul Dufy (1877-1953).
Si l’artiste a peint le Havre et les paysages normands, Nice et Perpignan, la capitale fut aussi source d’inspiration. Il y a passé une grande partie de sa vie, depuis son inscription à l’Ecole des Beaux Arts en 1900, et plus particulièrement dans le quartier de Montmartre.
Il a même occupé quelques temps l'un des ateliers au 12, rue Cortot, bâtisse qui abrite aujourd'hui le Musée de Montmartre où se tient justement l’exposition, avant d’investir un autre atelier dans l’impasse Guelma, dès 1911.


Au fil des déambulations dans les salles du musée, une production foisonnante et pour le moins éclectique s'offre aux regards.
On y rencontre le peintre s’affranchissant des écoles de son époque, (impressionnisme, fauvisme, cubisme) et resté sous une influence cézannienne après la rétrospective de 1907 consacrée au maitre disparu.






Il n’hésite pas à déployer la couleur au delà de la ligne au trait précis car dans le mouvement, l’œil enregistre la touche colorée avant le contour.
 
Franchissant allégrement les barrières de l’art, il est aussi dessinateur, aquarelliste, graveur, illustrateur de livres, créateur de mode, de tissus, de tapisseries et de mobilier, décorateur d'intérieur, d'espaces publics et de théâtres.













 
De la composition de 600 m² réalisée par Dufy pour illustrer l’histoire de l’électricité et de ses applications dans le hall du Palais de la Lumière et de l’Électricité, à l’occasion de l’Exposition internationale de 1937, nous avons un aperçu en réduction ici avec à portée du regard les portraits des cent dix savants et inventeurs ayant contribué à son développement.





 
L’image récurrente de la Tour Eiffel rayonne comme un phare dans la tourmente.
"Le Paris de Dufy" dans l’expression d’un enthousiasme communicatif offre bien quelques instants d’émerveillement. (Prolongation de l’exposition jusqu’au 2 janvier 2022)



  

dimanche 14 novembre 2021

Le Jardin des Plantes prépare ses illuminations

Au Jardin des Plantes, l’installation des lanternes chinoises ne se fait pas en un jour !
C’est le travail long et minutieux de toute une équipe d’artisans et de techniciens chinois qui s’activent depuis plusieurs semaines.


Toutes les formes de faune et de flore ont été conçues à Zigong, en Chine, mais l’assemblage se fait sur place. 


L’atelier est situé à l’abri des regards à proximité des grandes serres.



Sur les pelouses se dressent déjà des créatures que les promeneurs découvrent avec curiosité.



Aucune n’est imaginaire, ces espèces ont existé. La plupart n’ont jamais cohabité avec le genre humain, d’autres ont évolué. Certaines nous semblent reconnaissables, d’autres ont des formes surprenantes.
En amont, il y a de très sérieuses recherches scientifiques et un colossal travail de reconstitution effectués par les paléontologues du Muséum d’Histoire Naturelle.




Après « Espèces en voie d'illumination » (16 novembre 2018 au 15 janvier 2019) et « Océan en voie d'Illumination » (18 novembre 2019 au 19 janvier 2020), la 3e édition a pour thème « Evolution en voie d’illumination » et propose un vertigineux voyage dans les temps géologiques, depuis que les organismes marins ont commencé à s'adapter au milieu terrestre, il y a plus de 500 millions d’années, tout au long de trois périodes distinctes : le Paléozoïque (Ere Primaire) de -541 à -252,2 Ma; le Mésozoïque (Ere Secondaire) de -252 à -66 Ma; le Cénozoïque (Ere Tertiaire) de -66 Ma à nos jours.  



 
Les préparatifs pour l’exposition et l’illumination de ces structures parfois monumentales sont déjà bien avancés. Le spectacle nocturne débutera le 29 novembre 2021 et se prolongera jusqu’au 30 janvier 2022.


Mais la promenade est déjà magique et instructive en journée (et gratuite!). Un festival de couleurs éclatantes sous le soleil automnal, revigorantes sous le ciel gris, nous invite à découvrir la longue histoire du monde vivant.