mardi 6 février 2024

L' abolition de l’esclavage au Panthéon

 

Édifié comme sanctuaire à la gloire de Sainte Geneviève, protectrice de Paris et de la France, le monument à vocation religieuse commandé par Louis XV à l’architecte Jacques-Germain Soufflot et dont la construction entamée en 1764 se termine en 1790, devient presque immédiatement un temple laïc en accueillant Mirabeau, suivi de Voltaire en 1791 et Rousseau en 1794.



La fonction de l’édifice a cependant oscillé  plusieurs fois au cours du 19e siècle au gré des changements de régime. Eglise sous l’Empire, la Restauration, la Monarchie de Juillet et le Second Empire, Temple de l’humanité en 1848 sous la Deuxième République, puis définitivement Panthéon en 1885 sous la Troisième République.
Depuis 1791, est honorée dans ce mausolée la mémoire de personnalités qui ont marqué l'histoire de France, soit par une simple plaque au nom du défunt, un cénotaphe ou un tombeau.
Dans ces lieux qu’on arpente avec respect flottent aussi, comme d’envoutants parfums, la détermination, la générosité, la quête de connaissance, l’audace, le courage de ces hommes et de ces femmes qui ont offert un idéal de liberté pour tous.
Mais la liberté n’est pas un bien acquis définitivement. Les effluves les plus puissantes risquent toujours l’évaporation avec le temps qui passe. Il n’est pas vain de le rappeler.
Pour ne pas oublier ces innombrables figures du combat contre l’esclavage, le Centre des monuments nationaux a donné carte blanche à Raphaël Barontini, artiste né en 1984 à Saint-Denis. Ses œuvres mêlant photographie, sérigraphie, peinture et impression numérique, sont autant d’hommages à Sanité Belair (1781-1802), Jean-Baptiste Bellay (1746-1805), Joseph Ignace (1770-1802), Solitude (1772-1802), Louis Delgrès (1766-1802), Toussaint Louverture (1743-1803) et tant d’autres personnages historiques, légendaires ou inconnus pour reconstituer une version de l’histoire plus proche des protagonistes indigènes.

Bannières et drapeaux  à l’entrée de la nef.


 
Installations du transept nord et transept sud évoquant la traite dans le cadre du commerce triangulaire, le déracinement du continent africain, la déportation à travers l’océan Atlantique et la réduction en esclavage de millions d’hommes et de femmes, et aussi le marronnage constituant les premières tentatives de fuites et de résistance en Guadeloupe, à la Réunion et en Guyane. Ainsi que l’événement majeur de la révolution Haïtienne, la bataille de Vertières en 1803 conduisant à l’indépendance.



 
Ces compositions sont réunies sous le titre « We Could be Heroes ».

 
 
Dans la crypte, une autre exposition a également investi le Panthéon à l’initiative du Centre des monuments nationaux et de la Fondation pour la Mémoire de l'Esclavage, 
« Oser la liberté. Figures des combats contre l’esclavage ». 


Elle retrace la généalogie universelle d’une lutte qui a traversé les époques et les continents : la révolte, la résistance, le refus de l’esclavage et au-delà, celui de l’exploitation d’êtres humains et du racisme, combats guidés par les idéaux universels et l’irrépressible volonté de chacun de retrouver sa dignité, son humanité.

La déportation à travers l’océan Atlantique



Première abolition






Deuxième abolition



Contre l'oubli et les dérives racistes




Une foule de figures méconnues rejoint des personnalités déjà honorées en ces lieux, comme l’abbé Grégoire et Condorcet, Toussaint Louverture et Louis Delgrès, Victor Schœlcher et Félix Éboué, Aimé Césaire et Joséphine Baker.



 

Au coin d'une rue près du Panthéon, un hommage moins officiel.


Ces deux expositions se terminent le 11 février pour permettre au monument de se préparer à accueillir 80 ans après son exécution le 21 février 1944, Missak Manouchian et sa compagne Melinée, engagés avec les compagnons du FTP-MOI, unités de la Résistance communiste qui ont, à partir d'avril 1942, conduit la lutte armée dans la région parisienne, confirmant ainsi l’universalisme des combats pour la liberté. Pour la plupart juifs, étrangers et communistes, une chanson "L'Affiche rouge", composée par Léo Ferré à partir d'un poème de Louis Aragon, fait l’éloge de ces combattants entrés dans l’histoire.
 
Sources