mardi 10 janvier 2023

Déambulations au château de Vincennes


Une belle journée hivernale se profile, mais les températures sont bien fraiches pour une balade au Parc Floral. Tout proche du parc, se dresse un château fortifié, vaste ensemble médiéval de résidence royale. Alors c’est le moment d’aborder une période lointaine, de s’y initier d’une façon sans doute plus ludique qu’en feuilletant les pages d’un manuel d’histoire, tout en profitant des derniers jours de vacances scolaires pour grimper des escaliers en colimaçon, franchir les douves par une passerelle, lever les yeux sur l’impressionnant donjon, compter les meurtrières, laisser libre cours à l’imagination et se familiariser avec un vocabulaire d’une autre époque…


On accède à cet espace clos d’une enceinte de plus d’un kilomètre jalonnée de tours par la porte d’entrée d’origine.
Les lieux furent d’abord appréciés des souverains capétiens pour l’environnement calme et boisé et sa proximité avec la capitale. Ils y fondèrent un manoir de chasse au 12e siècle qui devint la résidence préférée de Saint Louis (1214-1270). Des vestiges, dont une fontaine, ont été retrouvés au niveau de la pelouse actuelle à l’entrée du château.
C’est avec Jean II le Bon de la dynastie des Valois que l’endroit est fortifié par une enceinte flanquée de 9 tours, et aménagé pour devenir une véritable résidence royale. 
La construction du donjon est entreprise sous son règne (1350-1364) et terminée en 1370 sous le règne de son fils Charles V (1364-1380).
Le plus haut du Moyen Age avec ses 52 m, il est également protégé par un mur de fortification avec des échauguettes aux quatre coins du chemin de ronde et de profondes douves aujourd’hui asséchées.



On y accède par une passerelle depuis le châtelet. 




Le cabinet de travail du roi était situé au deuxième étage du châtelet. 



Au 
deuxième étage du donjon, se trouvaient les appartements privés du roi. La chambre, pièce centrale du donjon est encore ornée d’une belle cheminée.


Quelques vestiges de motifs peints sur les voûtes témoignent du raffinement du décor. Du mobilier recevait les manuscrits les plus précieux de sa bibliothèque et ses plus belles pièces d’orfèvrerie.
Dans les tourelles d’angle étaient aménagées une chapelle associée à un oratoire, la salle du trésor, la garde-robe, l’étude et les latrines.
Ces pièces étaient presque toutes lambrissées et chauffées par des cheminées à hotte.



Au 14e siècle apparait une nouvelle musique de type polyphonique qui diffère des voix chantant à l’unisson, caractéristiques du chant grégorien. Les instruments se perfectionnent et une nouvelle façon d’écrire la musique est mise au point.
Charles V, grand amateur de musique, faisait venir quotidiennement des musiciens dont Guillaume de Machaut (1300-1377) considéré comme le grand compositeur français de ce règne.
Trois anges musiciens présentés dans cette salle réservée à l’origine à la garde-robe royale proviennent des faces externes du donjon, l’un avec un orgue portatif, le second avec une vièle à roue et le troisième avec une cornemuse.




Ils témoignent aujourd’hui de la sensibilité musicale du souverain.
 
Les étages supérieurs accueillaient les chambellans, les proches et les serviteurs ainsi que des réserves domestiques et militaires comme l’approvisionnement des machines de guerre déposées sur la terrasse.
 
La salle du conseil au premier étage du donjon, identique à la chambre du roi au deuxième étage, était le lieu des réceptions officielles et des séances de travail entre le souverain et ses conseillers. Sous les voûtes encore tapissées partiellement de lambris, soutenues par une colonne centrale finement ouvragée de décors sculptés, on peut visionner un film retraçant l’histoire du château au temps de Charles V.


Dès la Renaissance, le donjon et le châtelet font ponctuellement office de prison.
Quelques traces ont été gravées dans la pierre et même peintes.








Sous l'Ancien Régime, les grandes fenêtres des trois premiers étages ont été en partie murées pour adapter le donjon à son usage carcéral. Les traces de cette transformation sont ici conservées.
 
A la mort de Charles V, le chantier de la Sainte-Chapelle vient tout juste de démarrer en 1379 sur le modèle de la Sainte Chapelle du Palais de la cité à Paris, édifiée au milieu du 13e siècle pour Saint Louis.


Elle aussi est conçue pour abriter des reliques de la "Passion du Christ", longtemps rassemblées à Constantinople et exposées principalement à Sainte Sophie et dans les chapelles des palais impériaux byzantin (Boucoléon et Blachernes). 
La façade n'est terminée que sous le règne de Louis XI vers 1480. L'édifice est inauguré en 1552.
La Ste Chapelle de Vincennes est aussi haute mais plus longue et plus large que celle de la Cité. Elle ne comporte qu’un seul niveau. 
Les sculptures du portail en particulier témoignent de la maitrise de l’art de la pierre au 15e siècle.



L’édifice marque architecturalement la transition entre le gothique rayonnant et le gothique flamboyant. La Sainte-Chapelle de Vincennes est aussi célèbre pour ses vitraux, conçus par Nicolas Beaurain, considérés par les historiens de l'art comme étant parmi les plus beaux de la Renaissance.


Ils ne sont mis en place qu’en 1559. Très endommagés par la tempête de décembre 1999, ils ont fait l’objet d’une longue et minutieuse restauration ainsi que l’ensemble de la Sainte Chapelle. Le résultat est remarquable.



Au delà de la Sainte Chapelle une galerie d’arcades ouvre sur un ensemble d’architecture classique construit par Le Vau à la demande de Mazarin et de Louis XIV. Le pavillon du Roi achevé en 1658 et en symétrie le pavillon de la Reine seront abandonnés en 1682 au profit du fastueux château de Versailles fraichement édifié.


Le château de Vincennes est définitivement rayé de la liste officielle des résidences royales en 1784.
Successivement manufacture de porcelaine, arsenal d’artillerie, place forte militaire, archives de la Défense, il traversera encore des périodes agitées mais échappera à la destruction.

En supplément pour les enfants: un livret pédagogique PDF à imprimer