mercredi 29 mai 2019

Réflexions à propos de l’exposition du Louvre : Royaumes Oubliés. De l’Empire hittite aux Araméens


Par le biais de divers artefacts, l’exposition vise à faire connaitre au public l’histoire des Hittites et de leurs héritiers. De nombreux vestiges ont donné aux historiens la possibilité de reconstituer au moins dans les grands traits, les territoires qu’ils ont occupés, leurs langages et leurs écritures, leurs productions économiques et artistiques, leurs croyances et pratiques funéraires ainsi que la conception et l’organisation d’un système administratif, politique et social.

L’exposition montre quantité de moulages, un bon aperçu de l’adoption de cette technique et de la photographie au service de l’archéologie et de la muséographie 


Moulage d'un lion portant des inscriptions hiéroglyphiques louvites. L'original provient du royaume de Gurgum (actuelle Kahramanmaraş en Turquie) et il est exposé au musée de la ville.


Mise en parallèle d’un grand panneau mural représentant la porte des lions d’Hattusa, et des vestiges similaires de Karkemish.

On comprendra l'importance de cataloguer les vestiges en découvrant les véritables puzzles en 3D des originaux de Tell Halaf.  

Entre les lignes des cartouches explicatives apparaît aussi une petite histoire de l’hittitologie. La compétition des pays occidentaux pour s’imposer dans ce domaine est perceptible.
Qui a découvert quoi ? Il semblerait qu’au tout début du 19e siècle un Suisse, Jean-Louis Burckhardt remarqua dans la ville syrienne de Hama des signes hiéroglyphiques différents des caractères égyptiens. Mais cette découverte n’eut pas de conséquences immédiates. Tout au long du 19e siècle des missions de prospections furent entreprises par des scientifiques. Charles Texier, archéologue et architecte français, découvrit les vestiges de Boğazköy et les reliefs rupestres de Yazılıkaya en 1834, sans parvenir à les identifier. William John Hamilton, géologue anglais découvrit Alaca Höyük et le monument de la fontaine Eflatun Pınar en 1836. Georges Perrot, archéologue français, fournit en 1872 une description complète des reliefs rupestres de Gâvur Kalesi, et des précédents, dans un ouvrage, Exploration archéologique de la Galatie et de la Bithynie, publié en collaboration avec Edmond Guillaume (architecte) et Jean Delbet (médecin).
A la fin 19e siècle, les découvertes archéologiques suscitent toujours l’intérêt des Français, des Anglais et des Américains mais aussi des Allemands dans l’optique d’enrichissement des musées nationaux. Mais dans l’empire ottoman, on commence à prendre conscience de l’importance de ce patrimoine culturel à sauvegarder sur place. Dès 1883, Osman Hamdi Bey obtint la modification de la loi relative aux antiquités et devint le responsable des fouilles menées sur le territoire. Il fut le principal interlocuteur des étrangers venus entreprendre des missions archéologiques à cette époque. La construction du musée impérial (actuel musée archéologique d’Istanbul) était en chantier. Ceci explique la présence limitée des originaux au profit de nombreux moulages dans les salles de l’exposition actuelle du Louvre, dont ceux réalisés par Ernest Chantre lors des fouilles méthodiques qu’il entreprit avec sa femme sur les sites hittites en 1893 et 1894. De nombreuses tablettes d’argile couvertes d’écriture cunéiforme sont exhumées mais encore indéchiffrées. Faute de pouvoir réunir les fonds nécessaires, il n’y aura pas de suite. La série de moulages d’orthostates sera acquise par le musée du Louvre.

L’archéologue britannique, John Garstang, s’intéressera également à ces sites de l’Anatolie centrale en 1907, et à d’autres sites plus au sud. Une exposition retraçant son périple, photos à l’appui, a été présentée à Istanbul en 2015.

Mais les scientifiques allemands entre en scène avec un atout financier. Les industriels ont obtenu la concession pour la construction du réseau ferroviaire ottoman et avec elle, les relations économiques et diplomatiques s’intensifient.
Contrairement au British Museum et au musée du Louvre, les musées de Berlin n’avaient pas de collections d’antiquités orientales. Les recherches dans ce domaine sont encouragées pour remédier à cette lacune.
Ils obtiendront les autorisations et une première campagne de fouilles en 1906 sera confiée à Hugo Winckler et à Théodore Makridi. Otto Puchstein les rejoindra l’année suivante et sera fasciné par les monumentales constructions.
Le décryptage par H. Winckler d’un texte en akkadien, langue déjà connue, trouvé sur le site, permettra enfin l’identification de la ville antique Hattousa.
Mais les signes cunéiformes consignaient aussi d’autres langues sur les tablettes dont le hourrite et le sumérien, reconnaissables à l’époque, et d’autres idiomes totalement inconnus. Le savant tchèque Bedřich Hrozný put mettre en évidence le caractère indo-européen de ces langues et leur relation avec d’autres langues bien connues, le sanscrit, le latin, le grec… A partir de cette constatation, le décryptage pouvait commencer, grandement motivé par l’étonnante découverte de la présence d’Indo-européens en Anatolie au 2e millénaire avant notre ère.
Quant à l’impressionnant « butin » du baron Von Oppenheim, prélevé sur le site de Tell Halaf, il indique que les précautions prises un temps sous l’empire ottoman pour conserver le patrimoine n’embarrassaient plus grand monde au début du 20e siècle.



Les deux conflits mondiaux ont évidemment interrompu provisoirement les fouilles, mais elles avaient repris de façon plus élargie entre les deux guerres.
Mustafa Kemal en personne ne tarda pas à se lancer dans la compétition et ceci pourrait bien constituer une lacune de l’exposition, muette sur le sujet.
Sur sa décision en 1923, le musée hittite est fondé à Ankara, capitale de la toute jeune République, sur les hauteurs de la vieille ville dans un ensemble architectural de deux édifices ottomans du 15e siècle. (Il sera renommé musée des civilisations anatoliennes en 1967). Quelques artefacts, prélevés lors des fouilles étrangères commencent à s’y accumuler dans la louable intention de les préserver des dégradations. En 1935, les archéologues turcs Remzi Oğuz Arik et Hamit Koşay fouillent les sites et de nouvelles trouvailles viennent enrichir la collection.
Si à cette époque, quelques spécialistes commencent à bien connaitre la civilisation hittite, sa zone géographique d’implantation et sa langue identifiée comme appartenant au groupe linguistique  indo-européen, il reste encore bien des points à éclaircir. Et puis personne ne sait vraiment qui sont ces migrants indo-européens ni d’où ils viennent. La question provoque cependant les passions des occidentaux et l’élaboration de théories jusqu’aux dérives les plus sinistres.
Le sujet des origines ne se borne généralement pas à assouvir une curiosité scientifique et entraîne souvent des considérations plus politiques et idéologiques.
Le nouveau dirigeant de la Turquie ne manquera pas d’instrumentaliser à sa façon, l’hittitologie naissante. La thèse que les Hittites ont pour ancêtres des peuples turcs d’Asie Centrale sera développée et entrera dans les livres d’histoire de la Turquie moderne. L’argument de la présence turque en Anatolie précédant celle des Grecs et des Arméniens sera censé légitimer les nouvelles frontières de l'État-nation et donc la souveraineté territoriale. Cette interprétation aura les conséquences tragiques que l’on sait sur le cosmopolitisme.

Pour conclure, méfions nous des hypothèses archéologiques brandies comme des justifications à s’octroyer l’exclusivité de territoires, de techniques, de biens fabriqués ou construits dans le passé. L’archéologie, quand elle n’est pas détournée de son objectif sert avant tout à comprendre que l’histoire de l’humanité est une longue succession de migrations et de métissages qui ont engendré de multiples civilisations apportant chacune son lot au patrimoine mondial. Nous sommes tous des migrants et des métisses. Il n'est pas superflu de le rappeler.


Sources
Jean-Paul Demoule, Mais où sont passés les Indo-Européens ? Le mythe d’origine de l’OccidentSeuil 2014
Ricardo González Villaescusa, Le dessous des cartes de l’archéologie



lundi 20 mai 2019

L’exposition du Louvre: Royaumes Oubliés. De l’Empire hittite aux Araméens

Evénement culturel d’envergure puisque pour la première fois en France, il réunit une sélection de collections, habituellement éparpillées au Musée du Louvre à Paris, au Metropolitan Museum of art à New York, au British Museum à Londres, au Musée national du Danemark à Copenhague, au Pergamonmuseum à Berlin, et au Musée des Terres Bibliques de Jérusalem, concernant les Hittites, Néo-Hittites et Araméens avec des vestiges trouvés sur les territoires actuels de la Turquie et la Syrie, datés de 1400 à 750 avant notre ère.


Plus d’un siècle de fouilles archéologiques a révélé sur une vaste zone géographique des vestiges, des objets, mais surtout quantité d’inscriptions hiéroglyphiques louvites gravées dans la pierre ou sur les 30 000 tablettes d’argile en écriture cunéiforme, retrouvées dans les ruines de leur capitale Hattusa, qui seront déchiffrées à partir de 1915 par Bedřich Hrozný, linguiste tchèque. Véritables archives relatant de grands événements royaux, des traités diplomatiques, des décrets, des instructions pour l’administration des temples, qui permettront aux spécialistes de reconstituer l’histoire du Proche-Orient pour cette période de la haute antiquité.

La carte ci-dessous, est une photo de la page 5 du magazine Dossiers d’Archéologie - Hors série n° 36, mai 2019

  
La première partie de l’exposition évoque l’empire hittite à son apogée, en Anatolie et jusqu’aux territoires de la Syrie actuelle.


Comme les vitrines contenant des artefacts prêtés par le Metropolitan museum ne sont pas autorisées à être photographiées, l’image ci-dessus provient d’une copie-photo de la page 35 du magazine Le Journal du Louvre - N°47 - Grande Galerie, printemps 2019. Ce rhyton en argent et or est un chef-d’œuvre d’orfèvrerie de la période impériale hittite.


Reproduction du détail de la frise décorant le col du rhyton en forme de cerf.

Une série de moulages exécutés par Ernest Chantre lors de sa première mission archéologique en 1893 à Alacahöyük (à proximité de Çorum, Turquie), reproduit les reliefs originaux (datés du 14 et 13e siècles avant notre ère) ornant les bases des tours d’entrées de la ville et encadrant des portes monumentales dont celle dite « porte des sphinx ». Ils font partie des collections du Musée du Louvre.


Un personnage assis, peut être la déesse du soleil d’Arinna


Scènes de rituels lors des processions religieuses donnant lieux à des compétitions sportives, des cérémonies d’investiture avec remise d’objets symbolisant le pouvoir.


Prêtre reconnaissable à sa robe de cérémonie, menant des moutons et des chèvres au sacrifice.


Musicien tenant un instrument à cordes lors d'une procession du dieu de l’orage avec à sa suite un personnage tenant un animal, peut être un singe faisant partie des numéros de divertissements.


Le relief rupestre de Fıraktin (Fraktin) situé dans la province de Kayseri (Turquie) et daté du 13e siècle avant notre ère, a fait l’objet de moulages le décomposant en trois parties.


A gauche sur l’original, le Grand Roi Hattusili III dont le nom est écrit en hiéroglyphes louvites verse une libation devant un autel. Derrière l’autel, un dieu tenant une crosse, vraisemblablement le dieu de l’orage, Teshub, offre au roi un symbole de forme triangulaire qui est le signe du bonheur. Les deux personnages portant un bonnet pointu réservé aux dieux, il est probable que cette représentation fut exécutée par son fils et successeur Tudhaliya IV, signifiant ainsi que son père est mort et divinisé conformément à la croyance hittite.


La scène du milieu représente la Grande Reine Puduhepa, versant une libation à la déesse du soleil, Hepat. Sur l’autel entre la reine et la déesse, on distingue un oiseau de proie (aigle ?) intermédiaire entre les dieux et les hommes.


La troisième partie est gravée de hiéroglyphes louvites qualifiant Puduhepa : « Fille du pays de Kizzuwatna, aimée des dieux ». Cette précision peut se comprendre comme l'intervention de la reine dans une déclaration de diplomatie politique confirmant les liens avec des territoires conquis.

Au passage, petit rappel chronologique : Toutânkhamon (-1345, -1327) est le contemporain du roi Suppiluliuma Ier (qui règne vers -1350,-1320).  




Quelques vitrines et panneaux explicatifs attestent des relations entre les souverains hittites et égyptiens.
 
L’influence de la culture hittite s’est propagée dans les territoires conquis :








La deuxième partie de l’exposition s’intéresse aux conséquences de l’effondrement brutal de l’empire hittite. Après l’abandon et la destruction de la capitale Hattusa et l’installation des Phrygiens sur les territoires de l’ancien royaume, les descendants des Hittites entretiendront  l’héritage culturel et administratif dans les petits états éparpillés au sud-est :  
Karkemish, Melidiya (Arslantepe, Malatya), Gurgum (Karamanmaraş), Tabal et Kummuh (Samsat höyük) ont perpétué les traditions de sculptures monumentales et des reliefs inscrits en hiéroglyphes louvites jusque vers 950 avant notre ère.


La carte ci-dessous est une photo de la page 10 du magazine Dossiers d’Archéologie - Hors série n° 36, mai 2019


Karkemish semble avoir plus particulièrement dominé cette période


Moulage d’un orthostate représentant une créature hybride. 1000/900 avant notre ère. British Museum, Londres.


Moulage d’un orthostate représentant la déesse tutélaire de la ville de Karkemish, Kubaba. Elle porte une coiffe cylindrique à cornes et tient deux de ses attributs traditionnels : le miroir (ici manquant) et la grenade. Plâtre peint d’après l’original en basalte. 1000/900 avant notre ère. British Museum, Londres


Jambage de porte en basalte flanquant la porte nord d’un bâtiment situé en haut du grand escalier de l’aire cérémonielle. Il est recouvert de signes hiéroglyphiques louvite mentionnant le nom du souverain Katuwa qui a fait rédiger une prière à Kubaba dont il vente les mérites et pour laquelle il fait reconstruire le temple qui lui était dédié. Vers 900 avant notre ère. British Museum, Londres


Moulage d’une base de colonne ornée de deux lions mugissant découverte par Leonard Woolley devant l’entrée du temple de Kubaba. Vers 925 avant notre ère. British Museum, Londres.


Stèle en basalte représentant la déesse Kubaba, coiffée d’un polos L’inscription hiéroglyphique comporte la dédicace d’un grenier voué à la déesse. Le disque solaire qui la surplombe rappelle l’héritage de la sculpture impériale hittite. La stèle provient de Birecik aux environs de Karkemish.  900/800 avant notre ère. British Museum, Londres


Stèle de Tarhunpiya: la stèle funéraire en basalte (au centre de la photo) représente un jeune homme debout vêtu d’une tunique frangée. Il tient un oiseau de proie utilisé pour la chasse dans sa main gauche et un calame dans sa main droite. Ces attributs attestent de son rang aristocratique. La présence de l’écritoire fait référence à l’écriture araméenne. L’inscription nous renseignant sur son identité : Tarhunpiya, est en hiéroglyphes louvites et semble témoigner d’une transition culturelle. Une femme assise l’entoure de ses bras dans une attitude affectueuse. Sa mère probablement. Accueille-t-elle dans l’au delà son fils défunt selon les rituels hittites ou a-t-elle fait graver la stèle pour honorer sa mémoire ? Provenance Karamanmaraş, Turquie, antique royaume de Gurgum, 800/700 avant notre ère. Coll. Musée du Louvre.


Sur le site syrien de Tell Ahmar, une stèle en basalte a été retrouvée lors des fouilles dirigées par F. Thureau-Dangin et A. Barrois en 1928. Elle est datée d’environ 900 avant notre ère. Le relief principal représente Tarhunza, le dieu de l’orage sous un disque solaire. L’iconographie combine des éléments hérités de traditions hittites, égyptiennes, syriennes et mésopotamiennes. Sur les autres faces, des inscriptions en langue et hiéroglyphes louvites, furent rédigées par Hamiyata, quatrième roi de la dynastie du royaume de Masuwari. Il se présente comme le serviteur du dieu Tarhunza et évoque également les dieux mésopotamiens Sin et Ea, ou encore la déesse hittite de la fertilité Kubaba, figure tutélaire de Karkemish. La suite du texte évoque la stèle elle-même que le roi destinait à être placée parmi les dieux c'est-à-dire dans un lieu de culte. Coll. Musée du Louvre

Au 10e siècle avant notre ère, les Araméens, peuple nomade connu depuis le siècle précédent, pénètrent l’espace et se fixent dans les territoires de la Syrie et jusqu’au sud-est anatolien afin d’y fonder des royaumes. Les souverains utilisent d’abord les hiéroglyphes louvites ou le phénicien pour graver les inscriptions sur leurs monuments, puis l’écriture araméenne, alphabétique et cursive s’impose et se diffuse aux régions voisines.
Sam’al sur le site de Zincirli höyük (à proximité de Gaziantep) a livré de nombreux vestiges d’une ville prospère, capitale d’un de ces petits royaumes araméens.


Moulage d’une statue de Lion


Stèle en basalte représentant un roi Kulamuwa ou Panamuwa II ou Barrakib. Prêt du Staatliche Museum zu Berlin, acquis suite aux fouilles de F. von Luschan en 1902


Une importante partie de l’exposition est consacrée au tragique destin des vestiges (1000/800 avant notre ère) de Tell Halaf, Guzana, cité d’un autre royaume araméen, Bit Bahiani au nord de la Syrie, découverte par le baron von Oppenheim au début du 20e siècle.
Les fouilles seront autorisées par les autorités ottomanes et le somptueux palais du roi Kapara sera dégagé. Mais la 1ere guerre mondiale viendra interrompre les fouilles qui ne pourront reprendre qu’en 1927. Entre temps, les vestiges exhumés ont bien souffert. Max von Oppenheim fait acheminer une grande partie des reliefs préservés à Berlin pour que cette précieuse collection soit conservée. Il l’installe dans une ancienne fonderie et fait disposer les blocs de pierre de façon à reproduire une partie du palais. Le musée accueille le public dès 1930 et il continue de s’enrichir de nouvelles pièces. Mais en novembre 1943, une bombe au phosphore larguée par les Alliés provoque un incendie. L’eau froide sur le  basalte surchauffé sera fatale à l’intégrité des sculptures et orthostates qui explosent en de multiples fragments, 27 000 exactement qui seront entreposés au Pergamon Museum. En 2000 commencera un long et patient travail de tri et d’identification des morceaux. Dix ans plus tard une centaine de sculptures auront été reconstituées et seront exposées au Pergamon Museum. Ce dernier actuellement en rénovation, en a prêté une importante sélection au musée du Louvre pour cette exposition. 







Dont la fameuse statue funéraire de la déesse trônant (qui n’est peut être pas une représentation féminine)
 
Le parcours s’achève sur la fin d’une époque, alors que se profile déjà l’arrivée de nouveaux conquérants, les Assyriens, qui ne se contenteront plus de disséminer leurs comptoirs commerciaux.




Arslan tash, ancienne Hadatu araméenne deviendra cité assyrienne. Les deux taureaux de l’entrée du temple viennent en témoigner par un artifice artistique propre à la représentation assyrienne. Ils ont cinq pattes de façon à les percevoir à l’arrêt de face, et en marche de profil. L’une des sculptures porte une inscription, dédicace du souverain Tiglath Phalasar III (745-727 avant notre ère) à la déesse Ishtar. 

Une autre stèle du dieu de l’orage, grimpé sur un taureau, brandissant ses attributs climatiques symbolise parfaitement les sept siècles que l’on vient de parcourir en quelques heures de déambulation dans les salles de l’exposition. Les héritages culturels se transmettent, s'assimilent, puis se modifient... Et l'histoire continue.


Les légendes sous les photos illustrant ce texte sont largement inspirées des fiches explicatives accompagnant chacun des objets exposés.   
Musée du Louvre du 2 mai au 12 août 2019 : « Royaumes Oubliés. De l’Empire hittite aux Araméens ».

Sources:
Les grands traits de l'histoire hittite, Hatice Gonnet, Hittitologue. Chargée de recherche au CNRS. Chargée de cours à l’École du Louvre
Déchiffrage des écritures:  Hrozný, le « Champollion tchèque »
Dossiers d’Archéologie - Hors série n° 36, mai 2019
Le Journal du Louvre - N°47 - Grande Galerie, printemps 2019  

   

vendredi 10 mai 2019

Haute antiquité au programme des expositions parisiennes


Hasard du calendrier muséal ou volontaire mise en concurrence des puissants empires rivaux hittites et égyptiens par expositions interposées?
L’hittitologie ne provoque certes pas le même engouement que l’égyptologie auprès du grand public mais le programme de la saison est une belle opportunité de lui faire enfin découvrir ces rois hittites qui n’ont pas connu la postérité des pharaons.
 
Dans la Grande Halle de La Villette à Paris, "Toutânkhamon, le trésor du pharaon" (du 23 mars au 15 septembre 2019), dévoile 150 objets, infime partie des merveilles que recelait la sépulture inviolée jusqu'à sa découverte en 1922 dans la Vallée des Rois par une expédition britannique dirigée par Howard Carter et Lord Carnavon. Avant de repartir définitivement en Egypte dans le Grand Musée en construction près des pyramides de Gizeh, l’exposition itinérante fera escale dans d’autres métropoles. La ville d’Istanbul est-elle au programme ?
Et je me souviens de mon regard d’enfant médusé par la précédente au Petit Palais, "Toutankhamon et son temps" (17 février au 4 septembre 1967), organisée par Christiane Desroches-Noblecourt, égyptologue française, à l’époque conservatrice du département des antiquités égyptiennes du musée du Louvre.


Ce fut l’exposition du siècle avec un chiffre record : 1 260 000 visiteurs avaient défilé devant le fascinant masque funéraire en or massif et une soixantaine d’autres pièces.
Malgré l’absence du fameux masque en or, nul doute que la mise en scène à La Villette (organisée par la société américaine IMG) ne suscite la curiosité de nombreux visiteurs.

Mon choix s’est cependant porté sans hésitation sur celle présentée au musée du Louvre du 2 mai au 12 août 2019 : « Royaumes Oubliés. De l’Empire hittite aux Araméens ».


Il y a tout juste 10 ans j’avais vu, au centre du plateau anatolien, les monumentales constructions, les sculptures et bas-reliefs impressionnants sur les sites archéologiques hittites d’Alacahöyük, de Boğazkale (capitale Hattusa), du sanctuaire à Yazılıkaya et puis d’autres traces de leur présence comme le bas-relief rupestre du col de Karabel (région d’Izmir), une fontaine cultuelle : Eflatun Pınar près de Beyşehir.
Une approche muséale sur ces Hittites, l’un des plus anciens peuples connus de langue indo-européenne, et sur leurs héritiers, thème de l’exposition parisienne, ne pouvait donc que me séduire !
J’y suis allée le 3 mai, 2e jour d’ouverture et s’il n’y avait pas de désagréable bousculade, ni de difficulté pour observer les vitrines, divers reliefs et sculptures, les visiteurs étaient nombreux et attentifs à découvrir tout au long d’un riche parcours bien documenté, les pages d’une histoire longtemps méconnue.
Photos et compte-rendu de visite dans l'article suivant