Si au cours de mes balades parisiennes, il m’arrive
fréquemment d’être à la recherche d’autres architectures capables de réveiller la trop grande unité stylistique haussmannienne, d’apprécier les fantaisies de l'Art Nouveau, les influences venues d'ailleurs, les
vestiges d’époques révolues qui ponctuent le paysage urbain et qui font tout le
charme de la capitale, il est un lieu qui nous transporte par delà les
frontières, faisant fi de la géographie au point d’en gommer les océans et les continents.
Ici, la diversité est la priorité. Des réalisations spectaculaires affichent pour certaines des références culturelles tandis
que d’autres ont fait le choix d’un courant moderniste.
Fondation hellénique (1932), 24 nationalités. Le bâtiment
est un hommage aux architectes de la Grèce antique.
La Fondation suisse (1933), 17 nationalités. Sorte de
prototype de la “machine à
habiter” de Le Corbusier
La Cité internationale fut construite en bordure du parc Montsouris, à l'emplacement d’anciennes fortifications. Sur un vaste terrain de
34 hectares et autour de la Maison Internationale, une quarantaine de « maisons
» seront édifiées entre 1923 et 1969 avec les dons privés de grands industriels
ou banquiers et des subventions venant de pays du monde entier. Ce projet
incarnait un idéal humaniste et une utopie pacifiste nés du traumatisme de la
première guerre mondiale. Sa création fut motivée par la nécessité de loger
convenablement les étudiants et d’assurer le rayonnement de l’université
française. Mais les fondateurs, autorités françaises et mécènes, souhaitaient aussi
contribuer à la compréhension entre les peuples par le rapprochement des
futures élites internationales. Encore aujourd’hui, fidèle à l’idéal de
brassage culturel, chaque maison n’accueille pas exclusivement ses
ressortissants. Au moins un tiers de ses logements
doivent être attribués à des étudiants d’une autre nationalité afin d’éviter le
communautarisme et de favoriser le dialogue des cultures. La cohabitation doit
se vivre au quotidien.
Desservi par les stations éponymes de RER ou du tramway
T3 qui ceinture Paris, ce lieu historique
unique, presque centenaire, reste bien méconnu du public. Il est pourtant
accessible à tous. Pas besoin d’être étudiant pour parcourir en tous sens ces
allées piétonnes ombragées et lever les yeux sur ces façades étonnantes. Par
contre l’accès aux maisons est limité aux résidents surtout en cette période de
vacances de Toussaint, pour d’évidentes raisons de sécurité.
A l’entrée principale de la Cité internationale
universitaire, la Résidence André Honnorat (1936) était à l’origine un
dispensaire puis fut affecté jusqu’en 1968 à l’hébergement exclusif des étudiantes.
La Maison Internationale (1936) construite intégralement grâce
à une donation du philanthrope américain John D. Rockefeller Junior, a des
allures de château de Fontainebleau. Une aile de cette imposante bâtisse
héberge la Résidence Robert Garric créée en 1976, 38 nationalités.
La Fondation Emile et Louise Deutsch de la Meurthe (1925), 61 nationalités. La première et la plus vaste construction du Campus composée
de 7 pavillons aux allures de collège anglais.
La Fondation Biermans-Lapôtre (1927) 25 nationalités. Ce
bâtiment monumental et ses tourelles évoquent l’architecture traditionnelle
flamande et wallonne.
La Fondation danoise (1932) 18 nationalités.
Le Collège franco-britannique (1937), 65 nationalités.
Architecture typique de l’ère victorienne avec ses briques rouge sombre, ses
toits pentus.
Le Collège d’Espagne (1935), 25 nationalités, inspiré du
Palais de Monterrey à Salamanque.
La Maison des étudiants suédois (1931), 20 nationalités. Il
évoque un manoir du XVIIIe siècle.
La Maison de l’Italie (1958), 20 nationalités
La maison du Japon (1929), 17 nationalités. Elle est entourée d’un jardin d’agrément miniature
: étang, sentier sinueux, rochers, monticules artificiels, clôtures de bambou
et lanterne de pierre. Elle recèle une fresque de Fujita.
La Maison du Maroc (1927), 20 nationalités. La seule qui
ait consenti à nous ouvrir ses portes, à la faveur d’une exposition temporaire.
En prime nous avons pu voir de plus près le patio aux décors de mosaïques.
La Maison de l'Inde (1968 et 2013), 20 nationalités
La Maison du Mexique (1953), 19 nationalités.
Architecture
moderne aux volumes épurés articulés autour d’un patio-jardin central où se trouve une réplique de la
« Pierre du soleil », calendrier aztèque de 3,60 mètres de diamètre.
Sur une
façade on peut voir la reproduction d’une frise murale maya.
A l’autre extrémité de la grande pelouse centrale, la Maison
de l’Allemagne ou Fondation Heinrich Heine (1956), 24 nationalités.
Une passerelle enjambe l’avenue André-Rivoire pour accéder
à la partie Ouest du Parc et ses autres constructions.La Fondation Rosa Abreu de Grancher ou Maison cubaine
(1933), 20 nationalités
La Maison du Cambodge (1957), 39 nationalités. L’édifice classique en forme de U, est enrichi d’éléments décoratifs Khmers,
sculptures en granit représentant Anuman, le dieu-singe.
Fondation Lucien Payet (1933), 17 nationalités, bas-reliefs sculptés art-déco.
Maison des étudiants arméniens (1930), 21 nationalités.
Un symbole de renaissance pour une nation ayant vécu un génocide en 1915 et la
perte de sa souveraineté en 1920 jusqu'en 1991.
Maison des étudiants de l'Asie du Sud-Est (1930) Ancienne
Maison de l’Indochine, 27 nationalités
Maison des Provinces de France (1933), 60 nationalités
Un programme d’extension sans précédent prévoit dix
nouvelles maisons construites à l’approche du centenaire de la cité.
Résidence Julie-Victoire Daubié, (2018), au nom de la
première bachelière de France en 1861, 10 nationalités
La Maison des étudiants de la francophonie, 2020, 52
nationalités
La Maison de l'Ile-de-France (2017)
La Maison de la Corée du Sud (2018) a été récemment inaugurée.
Le Pavillon Habib Bourguiba, la Maison de la Chine, et la Maison de l’Egypte sont en cours de construction
La fondation Avicenne (ancienne maison de l’Iran) est en
complète restructuration depuis plusieurs années.
Il n’est aucunement fait mention d’une éventuelle Maison
de Turquie, dans l’histoire de la Cité. Ce qui n’implique pas l’absence totale
d’étudiants turcs sur le campus.
Milles excuses pour les quelques édifices ayant échappés à
mon objectif. Argentine, Brésil, Etats-Unis, Canada, Liban, Monaco, Portugal, Norvège…
La Cité internationale universitaire semble réunir tous
les atouts pour offrir un cadre de vie privilégié aux 6800 étudiants et
chercheurs, de toutes nationalités, qui ont eu la chance d’y trouver un hébergement
pour quelques jours ou quelques mois.
L’hébergement n’est pas la seule vocation
des lieux, l’épanouissement du corps et de l’esprit font partie du programme en
favorisant les rencontres avec des installations sportives et culturelles,
grandes pelouses, espaces arborés et jardins, stades, piscine, théâtre, grands
salons, bibliothèques, et des studios de musique.
Le lieu le plus cosmopolite de tout Paris où se croisent
plus de 150 nationalités est aussi un modèle écologique, précurseur en matière
de biodiversité. Ci-dessous un jardin de pluie.
179 espèces végétales différentes sont recensées et 52 espèces d’oiseaux nichent sur le campus. Les insectes
pollinisateurs sont les bienvenus, ils ont aussi leurs maisons.