D’anciens (1992) ou de plus récents (2013) séjours en
Lycie, antique province de l’Asie Mineure, bande côtière au sud-ouest de la
Turquie qui s’étend de Fetihye à Antalya entre mer et montagne, je garde les
souvenirs de lieux enchanteurs, d’époustouflants paysages (Saklıkent, Kekova, Simena,
plage de Kaputaş, mont Tahtalı, Chimaira…).
Des amis viennent de m’en faire découvrir une autre
facette pleine de charme. Blottie dans un écrin de verdure, entourée
d’orangers, de citronniers, de pamplemoussiers, de pruniers, d’un néflier du Japon (tr=malta
eriği), à l’ombre d’un gigantesque avocatier, leur petite maison dans le
village de Kargı m’a accueillie pour quelques paradisiaques journées.
Savourer l’instant présent, installée sur la terrasse est
déjà un petit bonheur. Ecouter, observer avec pour récompense la visite
impromptue d’un geai des chênes au plumage chatoyant. Caresser l’espoir qu’il
reviendra un autre matin pour être prête à capturer son image… Il est revenu se
poser sur le gazon !
Une promenade dans les ruelles sous un ciel menaçant se
solde par l’invitation d’une voisine à venir s’abriter quelques instants. En
cette période de Ramadan, elle jeûne. Mais un verre d’ayran sera le prétexte
pour nous retenir un peu plus, et nous l’écouterons nous parler de ses
occupations quotidiennes avec ses poules, ses chèvres, son potager, les
aubergines qu’il faudra récolter sans tarder sous la serre…
Un autre matin nous prolongerons notre promenade jusqu’au
canal d’irrigation récoltant les eaux ruisselant de la montagne et qui
s’éparpillent en ruisseau pour arroser les cultures du village. Partout où l’on
va, un rafraîchissant gargouillis nous accompagne. Une auberge-musée (Enver Yalçın Yörük müzesi) est notre destination du jour.
Nous nous installons pour un copieux
petit-déjeuner, composé comme il se doit des produits de la ferme, des œufs aux
olives en passant par la confiture d’agrumes et celle de betteraves rouge, le
miel, les crudités diverses, le beurre, le fromage et même quelques meze au yaourt, sans oublier l’assortiment
de pains et galettes, le tout arrosé à volonté de thé et d’un savoureux
cocktail de jus de fruits locaux, oranges, pamplemousses, grenades et mûres. Il
y a même sur la table quelque chose qui ressemble à de la confiture de lait en
moins sucré et légèrement aigre. Cette préparation est à base de fromage blanc
de lait de brebis. Intéressant !
Nous voici rassasiés pour de longues
heures !
Nous faisons l’impasse sur le lait d’ânesse, mais nous
apprenons qu’ici s’est déroulée en 2010 la cérémonie du mariage de Linda et Duman, des bourricots qui ont tout le respect du maître des lieux.
Enver Yalçın
a tenu à leur témoigner ainsi une affectueuse marque d’estime afin de faire spectaculairement
partager sa crainte de les voir disparaître des campagnes.
Le personnage, philosophe et poète à ses heures, comme
l’attestent ses écrits affichés un peu partout, n’a pas ménagé sa peine pour
accumuler en sillonnant les alentours une quantité d’objets anciens évoquant
les diverses activités de ses congénères, des nomades turkmènes sédentarisés en
ces lieux depuis quelques générations.
Ses trouvailles sont exposées avec une certaine recherche
scénographique et thématique. Vie quotidienne, travaux agricoles, élevage,
cardage et tissage de la laine, ferronnerie… un véritable musée ethnographique.
Symbole de la technologie d’autrefois cet instrument agricole (ci-dessus), utilisé pour le
battage des céréales, se nomme en turc: harman
döveni. Les pierres coupantes
enchâssées dans une planche de bois permettaient de séparer le grain de la
paille.
Ce témoignage culturel ne s’est pas fait en un jour. Il est
le fruit d’une vingtaine d’années de labeur. Depuis peu, des chambres d’hôtes
sont disponibles. Comme il ne manque pas d’humour, Enver Yalçin précise sur son site qu’aucune réclamation du type, le coq a chanté, l’âne a brait, la vache a
meuglé, l’agneau a bêlé, le chat a miaulé, le chien a aboyé, ne sera acceptée !
De retour chez mes hôtes, Anne et Bülent, il me reste à faire un petit tour dans le verger pour la cueillette du jour...
Magnifique ! Un coin de paradis qui a su conserver la douceur de la Turquie d'autrefois que nous avons tant aimée...
RépondreSupprimerRavie de constater que tu as repris tes tours dans différents coins de la Turquie…
RépondreSupprimerTrès intéressantes tes balades parisiennes des premiers mois de l'année, mais je suis bien contente de lire enfin tes récits de nouvelles escapades turques. J'attends la suite!
RépondreSupprimerJ'imagine que ce séjour a été merveilleux car il me fait rêver. Le charme de l'authentique comme j'aime, la nature, la vie comme avant... Je pense que tu en es revenue détendue et reposée.
SupprimerLe commentaire précédent est le mien : Babeth
SupprimerOui, ce séjour m'a redonné de l'énergie pour remonter la pente! Bien contente d'avoir pu vous transmettre la sérénité que j'ai ressentie en ces lieux et qui semble avoir inspiré vos empathiques commentaires! Merci à toutes.
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