De retour à Paris après un relatif court séjour
stambouliote mis à profit pour se couler dans un bain de verdure printanière en
forêt de Belgrade et à l’arboretum, une visite à l’exposition « La voix de la
forêt » proposée par le Petit Palais, fut une parfaite
transition d’autant plus que les journées pluvieuses s’enchainaient sans fin et
ne semblaient pas disposées à nous autoriser des balades dans la nature !
Qu’à cela ne tienne, puisque Théodore Rousseau (1812-1867) s’est immergé pour nous dans les sous-bois, les clairières,
qu’il a fait de la forêt de Fontainebleau son domaine de prédilection pour
étudier la végétation, la représenter en dessin, en peinture et réaliser des
tableaux, pour la plupart de véritables « portraits d’arbre ». Avec lui la nature n’est plus un décor mais
le véritable sujet de son œuvre, sa principale source d’inspiration, guidant
notre regard pour qu’il s’y plonge avec délice.
L’abreuvoir, 1850-1860, huile sur bois
L'allée des châtaigniers, vers 1837-1840, huile sur toile
qui avait été retenue par l’état en 1840 avant achèvement et non remis par
l'artiste à la suite du refus de l'œuvre au Salon de 1841. Son acquisition en
vente publique ne sera effective qu’en 1912.
Le Vieux Dormoir du Bas-Bréau, 1836-1837, huile sur toile
Alfred Sensier, le biographe de Th. Rousseau soutient que
ce tableau mettant en valeur les trois grand chênes bicentenaires a été
spécialement créé pour préserver l’ancienne apparence du site menacée par des
plantations de pins. La présence du troupeau de vaches et du bouvier souligne
une pratique pastorale traditionnelle en plein déclin dans les années
1850 : le pâturage dans la forêt de Fontainebleau.
« J’entendais aussi la voix des arbres […] :
les surprises de leurs mouvements, leurs variétés de formes et jusqu'à leur
singularité d’attraction vers la lumière m’avaient tout d’un coup révélé le
langage des forets. » Théodore Rousseau cité par Alfred Sensier en 1872.
Le massacre des Innocents ou Abattage d’arbres dans l’ile
de Croissy, 1847, huile sur toile inachevée. Le titre évoquant le récit
biblique du meurtre de tous les nourrissons ordonné par le roi Hérode à
Bethléem, témoigne de l’indignation de l’artiste. D’autres intellectuels
dénonceront également cette destruction de la forêt, dont ses amis de Barbizon
et Victor Hugo
Le Panorama de l'Histoire du siècle est une gigantesque huile sur toile réalisée par Alfred Stevens et Henri Gervex pour l'Exposition Universelle de
1889. Le fragment présenté ici est un portrait de groupe de peintres de
paysages, montrant l’importance acquise par le genre réaliste au cours du siècle.
Théodore Rousseau y côtoie ses amis, Dupré, Isabey, Millet, Couture, Daubigny, Diaz,
Corot, Troyon, Fromentin, Barye, Decamp, Courbet, et Robert-Fleury.
L’exposition du Petit Palais est aussi l’occasion de faire plus ample
connaissance avec l’histoire de la forêt de Fontainebleau.
Une carte de la forêt datée de 1839
Le combat de l’artiste pour la préservation de la forêt n’aura
pas été vain. Dès 1853, une "série artistique" est créée en forêt
de Fontainebleau, une réserve biologique en 1953, des réservoirs de biodiversité en 2009. Sous des vocables évoluant au fil des ans, une partie de la forêt est désormais protégée des interventions humaines et le public n'y a pas accès.
Les promeneurs ne manquent cependant pas de parcours pour assouvir leur soif de verdure, et ils sont nombreux à plébisciter cette forêt d'exception... 15 millions en 2023!
Au détour d'un chemin on peut y voir ce gros rocher portant un bas-relief de bronze en hommage aux deux peintres qui ont tant arpenté ces lieux.
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