lundi 2 décembre 2019

Cours et passages, rue du Faubourg Saint Antoine – côté impair

Le 11e arrondissement c’est le Paris de mon enfance et de mon adolescence. Il est toujours mon port d’attache lors de mes séjours parisiens, avec la Place de la Nation pour repaire. Même si depuis quelques années la focale a légèrement glissé en direction de Bastille. Autant dire que la rue du Faubourg Saint Antoine est la colonne vertébrale de mes déplacements encore aujourd’hui. 


Impossible de ne pas constater au fil des ans un changement d’atmosphère, une transformation en profondeur liée à la désindustrialisation du quartier, au départ en masse des ateliers et magasins d’ameublement qui a eu pour conséquence un phénomène que l’on nomme gentrification, éviction des classes populaires par les classes moyennes. Ces dernières se sont installées après rénovation dans les logements existants mais aussi dans d’autres bâtiments dont la construction n’était pas destinée à l’habitation. C’est l’engouement pour les lofts, espaces atypiques qui donnent à leurs occupants l’impression d’échapper à l’embourgeoisement que symbolise un appartement classique.
L’aspect général de la rue n’a pas vraiment été modifié malgré la multiplication des boutiques de vêtements et chaussures. Elle conserve de rares magasins de meubles mais plusieurs enseignes consacrées à la décoration de la maison.
Le shopping n’est cependant pas au programme du jour.
Surprise d’apprendre que l’endroit faisait l’objet de visites guidées, le moment est venu de franchir quelques portails.
Au plus près de chez moi, au 173 rue du Faubourg Saint Antoine, la cour ancienne n’a pas daigné se montrer ce jour la.   
La cour de l’Ours au no 95, se laissa admirer sans grogner. 


La façade du bâtiment sur rue, construit au 18e siècle, porte encore le haut-relief d’un ours sur piédestal. Côté cour, l’enfilade d'ateliers surmontés d’habitations date du 19e et début 20e siècles.


Tout au fond on aperçoit les ruines carbonisées de la prestigieuse peausserie Tassin qui y était installée depuis 1905 et fut la proie d’un incendie en 2015.


Dans l’un des ateliers, une petite boutique-musée en conserve la mémoire et les contacts, dans l’attente d’une reconstruction hypothétique. 


En face, l'ébénisterie Straure affiche un label EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant, distinguant les savoir-faire artisanaux.



Au no75, la Cour de l'Etoile d'Or est accessible par une belle porte cochère d’un immeuble construit fin 19e


Mais son histoire est bien plus ancienne. Une maison de maître y est construite vers 1640 comprenant également une cour et un jardin. 



La cour est progressivement utilisée par des artisans travaillant dans l'ameublement. 



Au 18e siècle le jardin disparaît, laissant la place à des écuries et remises constituant une deuxième cour qui accueillera ensuite des ateliers-logements puis en 1882 un grand immeuble-atelier de quatre étages et un bâtiment en surplomb au-dessus du passage cocher.



L’ensemble est verdoyant et coquet. Ne reste plus que l’architecture pour évoquer les activités ouvrières et artisanales de son passé. Ici la reconversion est spectaculaire.

Au no71, ce sont les Shadocks qui nous accueillent dans une jolie cour pavée! 



Leur créateur Jacques Rouxel (1931-2004) habita à cette adresse. La cour fut rénovée en 1998 par l’architecte Didier Drummond qui ajouta quelques éléments en hommage à la série d’animation diffusée à partir de 1968 à la télévision. 



Petit rappel : les personnages des Shadocks sont bêtes et méchants et ont pour principe : « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? ». Leurs antagonistes, les Gibis sont gentils et intelligents.

Avant de continuer vers la place de la Bastille on peut faire une brève incursion dans la rue de Charonne pour explorer les cours Saint-Joseph et Jacques Viguès et le passage Lhomme, sujet d’un prochain article.
 
A l’extrémité de la rue du Faubourg Saint Antoine, il n’y a plus qu’à traverser la rue de la Roquette pour trouver la cour Damoye au no12 sur la place, entre deux enseignes de restauration. 


Elle se prolonge jusqu'à la rue Daval offrant quelques instants de calme, brutal mais appréciable contraste avec l’effervescence de la place. 


Elle fut aménagée au 18e siècle par Antoine Pierre Damoye, un quincailler, pour abriter de nombreux ateliers et loger les artisans. 


Les bâtiments les plus anciens se situent de part et d'autre de l'accès rue Daval, et près de l’entrée côté place. On distingue les poutres sur les façades.



D’autres aménagements datent du 19e siècle, comme en témoigne le monte-charge.


Elle a fait l’objet de rénovation en 1990 et abrite un atelier de restauration d’affiches anciennes et un maroquinier. 


Un nouvel atelier de torréfaction de café a récemment ouvert, ambitionnant de perpétuer la réputation de la brûlerie Daval, ouverte en 1945 et fermée depuis peu.


Derrière les façades, cours et passages témoignent d’inéluctables transformations, chacun à leur façon. Des éléments récurrents, mais aussi de la diversité… De quoi battre le pavé une bonne heure car la liste n’est pas exhaustive.
Il y en a d’autres à découvrir côté pair de la rue du Faubourg Saint Antoine.

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