Situé à l’est du
Bois de Vincennes, en lisière de Nogent-sur-Marne, ce jardin est méconnu et donc
très peu fréquenté. Son relatif éloignement de la Capitale y est peut-être pour
quelque chose. Pourtant, il n’est qu’à 3 arrêts de bus de la station de métro
Château de Vincennes (ligne 1).
Pour tout dire je n’ai appris son existence que très récemment.
Suite à la visite du jardin des serres d’Auteuil,
prolonger la découverte de végétation exotique me tentait bien…
Mais à part une plantation de bambous, quelques feuilles
de bananiers et deux ou trois plaqueminiers (arbres à kakis) ce qui le
distingue aujourd’hui des allées du bois de Vincennes, ce sont les
constructions ou leurs vestiges qu’il abrite. Ce jardin nous fait revenir 100
ans en arrière, et nous emmène loin de Paris.
Dès l’entrée le ton est donné par un grand portique
chinois.
On enfile l’allée de droite pour trouver un stupa,
monument funéraire à la mémoire des Cambodgiens et Laotiens morts pour la
France au cours de la guerre 14-18
On traverse un pont khmer orné de najas
Puis un pont tonkinois
On croise un pagodon chinois
Puis on arrive sur l’esplanade du Dinh, place comportant un grand portique de pierre décoré, une urne funéraire en bronze,
copie des urnes impériales du palais de Hué et en face, surélevée de quelques
marches aux rampes ornées de dragons, une pagode rouge vif, modeste temple dédié
à tous les combattants vietnamiens morts pour la France et qui remplace depuis
1992 un temple plus imposant pillé et brûlé en 1984.
A proximité du pavillon d’Indochine, le seul qui a bénéficié
d’une restauration récente, on peut voir un bloc de houille du Tonkin et une stèle
en hommage à René Dumont (1904-2001), ingénieur agronome dont j’avais lu avec
un grand intérêt l’ouvrage à sa parution en 1973 : L'utopie ou la mort, et plus tard Un monde intolérable (1991). Il fut étudiant puis enseignant à
l’École Supérieure d’Agronomie Tropicale.
Au détour d’un chemin, une sculpture sur souche signée
Tom… Des écureuils pourraient bien avoir choisi l’endroit pour leur
approvisionnement en noisettes ! Mais ce jour là nous n’avons rencontré
que celui-ci !
Le voyage continue en Afrique avec la serre du Dahomey
Le Pavillon de la Réunion se trouve près d’une clairière
agrémentée d’un petit lac artificiel. On note au passage une Architexture de Johanne Le Guillerme. On
en retrouvera une autre occultant les fenêtres du pavillon de Tunisie à
l’abandon.
Le pavillon du Maroc est lui aussi bien délabré.
Tandis que le pavillon du Congo est parti en fumée en
2004, celui de la Guyane est bien entretenu et semble avoir été investi par les
jardiniers.
Il y a aussi ce monument dédié aux « soldats
malgaches » qui s’ajoute à ceux des « Indochinois chrétiens » et
des « soldats noirs » morts pour la France…
Des panneaux d’information jalonnent le parcours et on y
apprend que sa création remonte à 1899. C’était alors un jardin d’essai ayant pour
but d'accroître les productions de banane, cacao, café, caoutchouc, vanille, dans
les pays colonisés et d’en améliorer l'approvisionnement de la France
métropolitaine. Le commerce équitable n’était pas au programme !
En 1907, il est aménagé pour accueillir l’exposition
coloniale de mai à octobre.
Il reçoit des éléments architecturaux évoquant l’Asie et
l’Afrique, avec reconstitution de villages et recrutement d’indigènes et
d’animaux exotiques pour assurer l’animation, avec présentations et dégustations
des produits.
Les monuments aux morts seront ajoutés plus tard.
Ouvert au public depuis 2006, il est parfois décrit comme
le jardin le plus romantique de la capitale… Certes la balade au milieu d’une
végétation échevelée est agréable et pittoresque.
Certains regrettent l’atmosphère d’abandon qui émane des
lieux…
Les laisser se dégrader n’est-il pas un choix délibéré comme
pour se persuader que ces vestiges appartiennent à une époque révolue qu’on
aimerait bien pouvoir oublier ? Une façon de garder l’endroit un peu
secret pour qu’il n’attire pas trop les curieux, ni le regard de ceux qui
voudraient en savoir plus sur une période tragique de notre histoire et encore
lourde de conséquences.
Je le vois donc comme un lieu de mémoire qu’il faut
visiter pour prendre la mesure du passé colonial de la France, ce qui n’a rien
d’incompatible avec une flânerie au calme propice à la réflexion dans un décor
de charme.
45 bis, Avenue de la Belle Gabrielle, 75012, Paris
RER A Nogent-sur-Marne ou arrêt de bus 114
Cette promenade a l'air bien intéressante, les photos donnent l'impression d'entrer dans un monde fantomatique, j'espère aller visiter ce jardin suranné lorsque je viendrai à Paris. Gisèle
RépondreSupprimer