vendredi 28 septembre 2018

Au jardin d’agronomie tropicale René Dumont



Situé  à l’est du Bois de Vincennes, en lisière de Nogent-sur-Marne, ce jardin est méconnu et donc très peu fréquenté. Son relatif éloignement de la Capitale y est peut-être pour quelque chose. Pourtant, il n’est qu’à 3 arrêts de bus de la station de métro Château de Vincennes (ligne 1).
Pour tout dire je n’ai appris son existence que très récemment.
Suite à la visite du jardin des serres d’Auteuil, prolonger la découverte de végétation exotique me tentait bien…
Mais à part une plantation de bambous, quelques feuilles de bananiers et deux ou trois plaqueminiers (arbres à kakis) ce qui le distingue aujourd’hui des allées du bois de Vincennes, ce sont les constructions ou leurs vestiges qu’il abrite. Ce jardin nous fait revenir 100 ans en arrière, et nous emmène loin de Paris.

Dès l’entrée le ton est donné par un grand portique chinois.


On enfile l’allée de droite pour trouver un stupa, monument funéraire à la mémoire des Cambodgiens et Laotiens morts pour la France au cours de la guerre 14-18


On traverse un pont khmer orné de najas


Puis un pont tonkinois


On croise un pagodon chinois


Puis on arrive sur l’esplanade du Dinh, place comportant un grand portique de pierre décoré, une urne funéraire en bronze, copie des urnes impériales du palais de Hué et en face, surélevée de quelques marches aux rampes ornées de dragons, une pagode rouge vif, modeste temple dédié à tous les combattants vietnamiens morts pour la France et qui remplace depuis 1992 un temple plus imposant pillé et brûlé en 1984.





A proximité du pavillon d’Indochine, le seul qui a bénéficié d’une restauration récente, on peut voir un bloc de houille du Tonkin et une stèle en hommage à René Dumont (1904-2001), ingénieur agronome dont j’avais lu avec un grand intérêt l’ouvrage à sa parution en 1973 : L'utopie ou la mort, et plus tard Un monde intolérable (1991). Il fut étudiant puis enseignant à l’École Supérieure d’Agronomie Tropicale.




Au détour d’un chemin, une sculpture sur souche signée Tom… Des écureuils pourraient bien avoir choisi l’endroit pour leur approvisionnement en noisettes ! Mais ce jour là nous n’avons rencontré que celui-ci !


Le voyage continue en Afrique avec la serre du Dahomey


Le Pavillon de la Réunion se trouve près d’une clairière agrémentée d’un petit lac artificiel. On note au passage une Architexture de Johanne Le Guillerme. On en retrouvera une autre occultant les fenêtres du pavillon de Tunisie à l’abandon.




Le pavillon du Maroc est lui aussi bien délabré.


Tandis que le pavillon du Congo est parti en fumée en 2004, celui de la Guyane est bien entretenu et semble avoir été investi par les jardiniers.


Il y a aussi ce monument dédié aux « soldats malgaches » qui s’ajoute à ceux des « Indochinois chrétiens » et des « soldats noirs » morts pour la France…


Des panneaux d’information jalonnent le parcours et on y apprend que sa création remonte à 1899. C’était alors un jardin d’essai ayant pour but d'accroître les productions de banane, cacao, café, caoutchouc, vanille, dans les pays colonisés et d’en améliorer l'approvisionnement de la France métropolitaine. Le commerce équitable n’était pas au programme !

En 1907, il est aménagé pour accueillir l’exposition coloniale de mai à octobre.
Il reçoit des éléments architecturaux évoquant l’Asie et l’Afrique, avec reconstitution de villages et recrutement d’indigènes et d’animaux exotiques pour assurer l’animation, avec présentations et dégustations des produits.
Les monuments aux morts seront ajoutés plus tard.

Ouvert au public depuis 2006, il est parfois décrit comme le jardin le plus romantique de la capitale… Certes la balade au milieu d’une végétation échevelée est agréable et pittoresque.
Certains regrettent l’atmosphère d’abandon qui émane des lieux…
Les laisser se dégrader n’est-il pas un choix délibéré comme pour se persuader que ces vestiges appartiennent à une époque révolue qu’on aimerait bien pouvoir oublier ? Une façon de garder l’endroit un peu secret pour qu’il n’attire pas trop les curieux, ni le regard de ceux qui voudraient en savoir plus sur une période tragique de notre histoire et encore lourde de conséquences.  

Je le vois donc comme un lieu de mémoire qu’il faut visiter pour prendre la mesure du passé colonial de la France, ce qui n’a rien d’incompatible avec une flânerie au calme propice à la réflexion dans un décor de charme.

45 bis, Avenue de la Belle Gabrielle, 75012, Paris
RER A Nogent-sur-Marne ou arrêt de bus 114
Une visite guidée est prévue le 25 novembre 2018 à 14h30


1 commentaire:

  1. Cette promenade a l'air bien intéressante, les photos donnent l'impression d'entrer dans un monde fantomatique, j'espère aller visiter ce jardin suranné lorsque je viendrai à Paris. Gisèle

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