mardi 31 mai 2011

Le tombeau de Mevlana à Konya

Il n’est pas difficile d’imaginer dans l’ancienne capitale seldjoukide, l’importance de l’influence mystique du très vénéré Mevlana Celaleddin Rumi (1207-1273), fondateur de l'ordre Mevlevi des Derviches Tourneurs. Son père Bahaeddin Veled, portant le titre de Sultan des Savants et fuyant les Mongols fut invité par le sultan Alaeddin Keykubad à s’installer à Konya qui accueillait déjà de nombreux hommes de sciences ou d’art. L’illustre refugié politique s’y installa avec toute sa famille et ses proches en mai 1228.
A sa mort, deux ans plus tard, les disciples du père se regroupèrent autour du fils, héritier de ses grandes connaissances. Une grande amitié lia Mevlana Celaleddin Rumi avec le derviche Şemseddin, son maitre spirituel, puis avec l’orfèvre pieux Selahaddin et enfin avec Çelebi Hüsameddin auquel il dicta les six volumes du Mesnevi, sa plus grande œuvre mystique et poétique, délivrant des messages de sagesse universelle.
Le türbe construit en 1274 pour recouvrir sa tombe et celle de son père est aujourd’hui un lieu de pèlerinage où affluent turcs et étrangers toujours aussi impressionnés par ce grand maitre de la tolérance, guide incontournable du questionnement intellectuel sur l’humanité.


Le célèbre dôme cannelé recouvert de tuiles vernissées turquoise ne fut rajouté qu’en 1396. Plus tard les sultans ottomans contribuèrent à enrichir la décoration du lieu.


Les disciples de Mevlana se regroupèrent aux environs et des bâtiments annexes furent construits pour former un tekke, reconverti en musée depuis mars 1927 et présentant les plus belles pièces des arts calligraphiques, des objets précieux en bois sculpté, en verre décoré, en cuivre, en argent… des instruments de musique, une superbe collection de tapis de prière anciens…

Cellules du tekke

La boutique de souvenirs est là pour nous rappeler que le rayonnement de Mevlana dépasse les frontières. Une littérature abondante plurilingue trône sur les étagères. Un auteur en particulier retient l’attention : Eva de Vitray Meyerovitch, docteur en philosophie, écrivain, chercheuse et directrice du service des sciences humaines au CNRS, consacra une grande partie de sa vie au soufisme et s’employa à divulguer l’œuvre et l’enseignement de Mevlana Celaleddin Rumi dans une quarantaine d’ouvrages, dont la première traduction en français du Mesnevi.
Décédée en 1999, son cercueil a été transféré, selon son souhait, dans le grand cimetière de l'autre côté de l'avenue, proche du türbe de Mevlana en décembre 2008. (Pas celui de la photo ci-dessous)
Son engagement intellectuel et sa quête personnelle forcent le respect. On ne peut qu’admirer son courage et sa contribution dans le combat contre les préjugés.


De quoi visiter avec grand plaisir cette ville qui est parfois considérée, à tort, comme un bastion de l’intégrisme musulman. Les enseignements de Mevlana continuent de diffuser à Konya un sentiment de sérénité comme celui que l’on peut éprouver lors d’une cérémonie de sema ici ou ailleurs, en dehors de toute croyance religieuse.

3 commentaires:

  1. Konya, la seldjoukide et Konya, la soufie, assurément une ville qui mérite qu'on s'y intéresse, que j'apprécie tout particulièrement et à laquelle j'avais consacré un certain nombre d'articles en 2009 suite à ma dernière visite.

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  2. L’atmosphère de Konya est en effet bien attachante. Ne pas flâner longuement dans le quartier historique serait une lacune regrettable pour qui veut connaitre la Turquie. On n’en parlera jamais assez!

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  3. Bonsoir Entre deux rives,

    Je suis scotché à l'écran, litéralement.
    Bravo, vraiment, deux nouveaux articles excellents coup sur coup et qui me guident lentement vers l'endroit où je dois me rendre.

    Merci
    Pascal

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